Interprête : Noah Wyle
Première apparition : Episode pilote
Dernière apparition : Episode 11x22 The Show Must Go On
Apparitions en guest-star : Episodes 12x14 et 12x15, épisodes 12x19 et 12x20, et un retour prévu pour la quinzième et dernière saison.
Statut : Externe en chirurgie (saisons 1 et 2) Interne en chirurgie (saison 3) Interne aux urgences (saisons 3 à 8 ) Chef des internes (saison 8 ) Titulaire aux urgences (saisons 9 à 11)
Situation familiale : Fils de Jack et Eleanor Carter, petit-fils de John et Milicent Carter, frère de Bobby Carter (mort d’une leucémie), cousin de Chase Carter.
Relations amoureuses : Susan Lewis (épisode 1x11, saison
Harper Tracy (saison 2) Abbey Keaton (saison 3) Anna Del Amico (saison 4) Roxanne Please (saison 5) Lucy Knight (épisodes 5x15 et 5x16) Elaine Nichols (saison 6) Rena Trujillo (saison 7) Abby Lockhart (saisons 8 à 10) Makemba « Kem » Likasu (à partir de la saison 10) Wendall Meade (saison 11).
Pilier historique du Cook County, Carter en est aussi une des figures les plus attachantes. En onze saisons, l’étudiant emprunté s’est transformé en médecin aguerri, altruiste jusqu’au bout.
« Il est pas mignon ? » C’est ainsi que le sarcastique docteur Ross apostrophe John Carter le jour de son arrivée aux urgences (épisode pilote). Sagement planté devant l’accueil, blouse blanche amidonnée et raie au milieu de nerd mal dégrossi, l’étudiant en médecin a tout du premier communiant. Ces dents bien alignées et ses cravates soyeuses le trahissent : l’aspirant chirurgien est un enfant bien né. Avec son élégance East Coast, bretelles et pantalon à pinces, on dirait un petit-fils Kennedy tout droit sortir d’une école privée ou d’un match de polo. Mais qu’est-ce que l’héritier d’un clan multimillionnaire vient faire aux urgences de l’hôpital Cook County, où se donne quotidiennement rendez-vous toute la misère de Chicago ?
Pour John Truman Carter, nommé comme son grand-pèreet d’autres aïeux avant lui, c’est la question d’une vie. Pendant les onze saisons que le jeune médecin passera au service des urgences (qui font de lui le personnage le plus endurant de la série), il n’aura cesse de prouver, aux autres comme à lui-même, que « l’argent ne fait pas tout ». Que ce qui compte, c’est justement ce qu’il n’a pas reçu, ce bonus humain qu’il veut donner quand même. Typique du mélodrame : au garçon grandi sous les dorures, il a manqué la chaleur d’un vrai foyer. À savoir l’amour d’une mère, grande bourgeoise réfrigérante claquemurée dans le deuil indépassable de son autre fils Bobby (John et Bobby, ça ne s’invente pas), emporté par une leucémie. Maman noie son chagrin dans l’alcool, Papa s’aggripe au cours de la Bourse… Délaissé, John acquiert la sensibilité sismographique de ceux qui guettent chez l’autre le moindre frémissement pouvant s’apparenter à une ébauche de sentiment. Sans l’affection d’une grand-mère excentrique, qui le verrait bien prendre sa suite à la tête de la fondation familiale, le jeune homme aurait tout aussi bien pu tourner sociopathe. Son parcours hospitalier va d’abord le sauver lui, en lui permettant de confirmer sa vocation altruiste et de se confronter une bonne fois pour toutes à son insécurité affective.
Carter a-t-il la peau trop douce pour les urgences ? C’est la question qu’on se pose au début, en le voyant débarquer en bleu timide et propre sur lui. C’est aussi un ressort dramaturgique, du genre Candide au pays des cathéters : à hauteur de petit nouveau, le téléspéctateur découvre l’hôpital à travers ses yeux, éprouvant avec lui l’intensité de chaque première fois. Première perf, première connerie, première garde de vingt heures, première naissance, premier déçès, première opération… Les scénaristes ont en outre la bonne idée d’attribuer à l’étudiant un mentor au caractère antagoniste, en la personne de Benton, le chirurgien qui le supervise. Benton a l’arrogance du virtuose d’origine modeste qui prend sa revanche sociale ; Carter la modestie susceptible du privilégié qui veut être reconnu pour ses compétences. La froideur du premier n’a d’égal que l’aisance du second à fraterniser, quitte à oublier les gardes-fous. Ensemble, ils résuement la problématique qui se pose à tout soignant : comment alléger la douleur des autres sans se laisser dévorer ? Trop pudique pour verser dans le sentimental, Benton a tranché en se limitant au maniement du bistouri. Plus sensible à la souffrance immatérielle, Carter est capable de serrer dans ses bras une victime d’Alzheimer qui le prend pour son fils ou de manquer sa remise de diplôme pour tenir compagnie à une petite cancéreuse (épisode 2x22). Son empathie est communicative : en s’attachant à ses patients, il nous attache à la série. Tout l’enjeu de ses premiers pas consiste à trouver la juste distance, ce en quoi il est inspiré par son autre modèle, l’humaniste Mark Greene.
Malgré sa tendresse, Carter n’est pas un perdreau de l’année confit dans les bons sentiments. Parce qu’il est aussi doué et ambitieux, il est prêt à tout pour obtenir la reconnaissance de Benton et clouer le bec de ses proches, qui ne comprennent pas son besoin de travailler pour gagner sa vie. L’esprit de compétition chevillé au corps, il peut se monter servile pour plaire à ses chefs et vit mal la concurrence, capable à l’occasion d’être mauvaise camarade pour doubler un autre disciple. Brillant dans l’action mais peu rigoureux quand il s’agit d’ingurgiter des données théoriques, le Carter de la première heure a tendance à se reposer sur ses lauriers. Rassuré par les éloges consentis par Benton à la fin de son stage (« Tu seras un bon médecin, Carter »), l’innoçent part en vacances en oubliant ses livres, alors qu’une mission redoutable l’attend en deuxième saison : réussir son internat. Le fils mal-aimé croit à l’époque qu’il veut être chirurgien, métier socialement plus proche du souhait que ses parents auraient pu avoir pour lui. Alors que le voilà tirant sur la corde pour parfaire aux exigences d’un Benton intraitable, qui l’oblige à donner le meilleur, Comme on commence à le connaître, on sait déjà ce que lui ignore : la technicité impersonnelle du bloc opératoire n’est pas faite pour lui et c’est dans le chaos des urgences, au milieu des junkies et des SDF, que le gosse de riche trouvera sa place. En choisissant la carrière d’urgentiste, renonçant même à être payé la première année pour obtenir un poste, Carter passe enfin à l’âge adulte.
Le médecin au grand cœur est aussi un cœur d’artichaut. Harper, Maggie, Anna, Roxanne, Wendall… Ses coups de foudre pour de jolies collègues ne sont pas toujours réciproques, mais son charme un peu enfantin lui garantit un nombre non négligeable de conquêtes. S’il n’a pas la séduction d’un Doug Ross ou le regard ténébreux de Luka Kovac, le craquant jeune homme est moins naïf qu’il n’y paraît, avouant même avoir perdu son pucelage à 11 ans avec la bonne des parents (épisode 8x16)… Mais cette précocité ne trompe personne : Carter est un grand sentimental, qui cherche assidûment la femme de sa vie.
À partir de la sixième saison, les auteurs s’acharnent à mettre à l’épreuve son image de gentil garçon. Poignardé par un patient schizophrène (épisode 6x13), Carter ne se remet pas de l’agression, qui a coûte la vie à son amie Lucy. Il se met à fumer des cigarettes, et plus fou encore, à se shooter aux narcotiques entre deux patients. Après avoir tié son cousin de la drogue, le bon samaritain est rattrapé par l’atavisme familial. Sa peau douce laisse place à une barbe de trois jours… On est en train de le perdre. Aussi inquiets que le téléspéctateur, ses confrères l’envoient de force dans un centre de désintoxication dont il revient à moitié guéri (épisode 6x22).
C’est que le traumatisme a ouvert des blessures anciennes, que tout désormais vient raviver : le divorce de ses parents (saison
, la mort de sa grand-mère (saison 9), sa relation compliquée avec Abby, l’infirmière qui partage ses problèmes d’addictions et qu’il dispute à Kovac. En amour, Carter à l’orgueil aguisé des jolis garçons qui craignent qu’on leur préfère des hommes plus virils… Mais loyal avant tout, c’est avec son rival qu’il part en mission humanitaire au Congo, franchissant un pas supplémentaire dans sa quête identitaire (épisode 9x22). Là où le besoin est immense, celui qui a tout peut enfin tout donner, et déposer son trop lourd héritage. C’est aussi en Afrique qu’il rencontre la compagne tant espérée, Kem. Et c’est pour elle, la mort de leur bébé ayant scellé leur union pour le meilleur et pour le pire, qu’il quitte finalement le Cook County. Emportant avec lui les vestiges de sa candeur, et les derniers instants d’une époque…